Trois skippers, trois histoires à écrire sur la route vers Kinsale

D’ici là, Gaston Morvan, Chloé Le Bars et Victor Le Pape auront fait leur entrée dans la course. « Tout l’enjeu c’est de ne pas perdre La Solitaire sur cette première étape, ne pas accuser de retard », commente avec pragmatisme Gaston, le chef de file de la Filière. Pour sa troisième solitaire (7^e, en 2021 et premier bizuth, 5^een 2022), le natif des Abers garde le sourire à quelques heures du départ. Enthousiaste à l’idée de retrouver l’adrénaline que génère cette course unique, il profite des derniers instants à terre pour analyser de manière méthodique le parcours et la météo à venir. Pas de boule au ventre, il avance avec plus de sérénité que sur les éditions passées même s’il sait que le travail à accomplir est immense. Positionné comme un redoutable outsider face à certains favoris plus expérimentés et qu’il connaît très bien, il endosse le rôle sans sourciller mais avec la détermination de celui qui ne laissera pas passer sa chance. « On peut me souhaiter de la bonne glisse, de la réussite dans les options et de prendre du plaisir à bord, de vivre un beau moment de sport pendant un mois », commente Gaston en cette veille de départ.

À bord du Figaro Océane, Chloé Le Bars a du mal depuis hier à cacher les « petits pics de stress » qui surgissent parfois quand elle ne s’y attend pas. Elle aussi s’est préparée minutieusement. « Je n’ai pas très bien dormi la nuit dernière, j’étais en train de faire des listes de ce qu’il ne fallait pas que j’oublie avant le départ. Mais finalement les listes étaient un peu vides car le bateau est prêt. Le seul vrai dossier qu’il reste à gérer c’est l’aspect météo », explique la jeune femme qui a consacré une bonne partie de sa matinée à travailler seule sur les fichiers de vent. Elle compte parmi les cinq femmes engagées sur cette édition et sait que son expérience de l’an dernier (4^e bizuth, 25^e) va lui être précieuse sur ce parcours de 610 milles vers Kinsale. « Sur cette première étape, il y des moments où nous aurons peut-être du vent un peu soutenu. L’appréhension des conditions un peu plus ventées, c’est quelque chose que j’ai pas mal travaillé cette année. Quand on sait régler le bateau, on se rend compte que ce n’est pas plus difficile. C’est juste l’expérience qui finit par rendre plus confiant dans telles ou telles conditions. Ça va être une belle étape où il va y avoir beaucoup de choses à jouer », espère Chloé.

Pour Victor Le Pape, c’est le grand saut…. Il a enfin rendez-vous avec sa première Solitaire du Figaro Paprec. À 24 ans, il est le dernier arrivé au sein de la Filière et a su profiter de l’expérience de Gaston et Chloé et de l’encadrement du Pôle Finistère Course au Large pour arriver le mieux préparé possible sur l’épreuve. Après son frère Martin, c’est à son tour de s’attaquer à l’une des plus belles courses au large en solitaire. Conscient de ce privilège, le skipper du Figaro Espoir veut profiter de chaque instant et nourrir son instinct de compétiteur. « J’ai bien imaginé ce moment du départ. Les émotions sont assez changeantes. J’ai eu une semaine assez tranquille, et là, le stress commence à monter un peu. Je crois que c’est normal pour un bizuth de se demander si on n’a rien oublié. Je reste serein et j’ai hâte d’être au départ. Ça va être un grand moment à vivre pour moi », explique le bizuth. Pour poursuivre dans l’histoire de famille, Victor a préparé sa météo ces derniers jours avec son père Christian, qui a formé parmi les plus grands solitaires au sein du Pôle Finistère Course au Large, probablement les modèles les plus inspirants dans les yeux de l’enfant qu’était alors le cadet de la fratrie. 

Encouragé régulièrement par Tom Laperche, tenant du titre et ancien membre de la Filière Région Bretagne – CMB, Gaston, Chloé et Victor ont tous les trois envie de pointer au plus vite leurs étraves dans la magnifique baie de Kinsale. Il leur faudra compter plus de trois jours de course pour y arriver. Cette entame de La Solitaire du Figaro Paprec est un sacré morceau avec des points de passage iconiques comme l’île de Wight ou le rocher du Fastnet. La bataille sera de chaque instant et c’est ce que les solitaires de la Filière sont venus chercher tout comme les 29 autres skippers engagés cette année. « Ce parcours m’inspire bien ! C’est la première fois que je vais emmener le bateau à l’étranger sur La Solitaire donc c’est cool ! Trois traversées de la Manche, ce n’est pas rien. La Mer Celtique, c’est un gros dossier et l’arrivée à Kinsale va être un beau moment je pense. Il y a du jeu à faire, dans les courants et les systèmes de vent un peu compliqués. Il y a tout dans cette étape : des dépressions, des anticyclones, des dorsales, des fronts. Tout ce qu’il faut pour faire plein de pièges et générer du jeu », termine Gaston bien déterminé à être le premier à boire une Guinness sur le ponton de Kinsale !